Mise à jour COVID-19 : le Migrant Rights Network a récemment fait appel à des élus de partout au Canada pour appuyer leur demande de soutien au revenu pour les travailleurs migrants et les personnes sans-statut vivant au Canada. Jusqu’à présent, 53 élus ont montré leur soutien à cette proposition. Veuillez trouver la lettre et la pétition ici (en anglais seulement).
L’impact de la COVID-19 est ressenti par les canadiens d’un océan à l’autre, peu importe l’âge, le statut de citoyenneté ou le statut professionnel d’une personne. En plus de bouleverser temporairement la façon dont nous vivons, nous travaillons, nous jouons et nous magasinons, la COVID-19 impacte également la chaîne d’approvisionnement alimentaire, les propriétaires de fermes partout au Canada, et les travailleurs qui cueillent, plantent et récoltent notre nourriture.
Chaque année, environ 50 000 travailleurs étrangers temporaires viennent au Canada pour la saison des semailles printanières, la saison de croissance estivale et la saison de récolte et de cueillette en automne. Les producteurs de fruits et légumes, les poissonneries ainsi que les usines de transformation des aliments et de viande dépendent tous de travailleurs étrangers temporaires afin de contrer la pénurie de main d’œuvre chaque année. Certains travailleurs étrangers sont ici toute l’année et travaillent dans des serres, des restaurants, des hôtels, des maisons privées ou des usines de transformation des aliments. D’autres arrivent par le biais du Programme des travailleurs agricoles saisonniers à des moments bien spécifiques pendant la saison de croissance ou de récolte. Bien qu’ils ne restent pas tous pendant une longue période dans notre pays, il est clair que les travailleurs étrangers temporaires sont un élément essentiel de la chaîne d’approvisionnement alimentaire et ont un rôle important pour l’économie du Canada.
Cette année, un retard dans la saison des semailles printanières, couplé à un effectif réduit, pourrait aboutir à une diminution globale du rendement de la saison de croissance. Une épidémie parmi les travailleurs d’une ferme pourrait, en effet, impacter la récolte, alors que certains fermiers dénoncent déjà que leur récolte sera réduite de 50% en 2020. Plusieurs transformateurs de viande au Canada et aux États-Unis ont réduit ou suspendu leur production au cours des dernière semaines, ce qui pourrait impacter la sélection disponible au supermarché et augmenter les prix. D’autres experts pointent du doigt le pic de chômage qui, à son tour, a entraîné une augmentation de l’utilisation des banques alimentaires, comme facteur aillant amplifié les problèmes de sécurité alimentaire et aillant exposé les vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement du Canada.
Mi-mars, le Gouvernement fédéral du Canada a fermé les frontières du pays à tous les voyageurs non-essentiels. Cependant, après avoir reconnu qu’une pénurie de travailleurs pourrait avoir un sérieux impact sur la chaîne d’approvisionnement alimentaire, une exception a été faite pour les travailleurs venant au Canada sous le Programme fédéral des travailleurs étrangers temporaires. L’alarme sur l’impact de la COVID-19 sur la population de travailleurs migrants a été sonnée peu après qu’un nombre de travailleurs étrangers dans une pépinière de Kelowna aient été infectés par la COVID-19. Les défenseurs étaient en effet inquiets qu’un accès approprié aux services de santé, à la protection et à des salaires ne pourrait pas être accordé aux travailleurs étrangers pendant leur période d’auto-isolement ou s’ils venaient à tomber malades.
Ci-dessous se trouvent certaines des nouvelles lignes directrices pour les travailleurs étrangers temporaires et les propriétaires d’entreprise pendant la COVID-19 :
- Les travailleurs étrangers doivent s’isoler pendant 14 jours après leur arrivée.
- Les employeurs sont responsables de l’application des règles d’éloignement physique et des ordres d’auto-isolement.
- Chaque employeur/employé recevra environ $1 500 pour compenser le coût de l’ordre d’auto-isolation de 14 jours. Cette compensation dépend du respect des règles de la Loi sur la mise en quarantaine.
- Certaines provinces ont supprimé les périodes d’attente pour avoir accès à la couverture des soins de santé et acceptent aussi les demandes associées à la COVID-19.
- Les employeurs font face à des pénalités importantes (amendes, emprisonnement ou les deux) s’ils ne respectent pas l’ordre de 14 jours de quarantaine.
- Les employeurs doivent assurer le transport, le logement, la nourriture et l’accès à des fournitures sanitaires pendant la période de quarantaine de 14 jours.
- Le gouvernement modifiera l’Étude d’impact sur le marché du travail et annulera la période de recrutement de 2 semaines ; les travailleurs dans la catégorie à faible salaire du Programme des travailleurs étrangers temporaires peuvent maintenant obtenir un emploi sûr pour 2 ans, et non plus un.
Comme tout autre voyageur étranger arrivant maintenant au Canada, les travailleurs migrants doivent observer une période d’auto-isolation obligatoire de 14 jours avant de pouvoir commencer leur travail essentiel dans les vergers, les champs et les serres du Canada. Comme la plupart d’entre-eux sont logés par leur employeur, la responsabilité d’assurer l’éloignement physique et d’imposer la quarantaine de 14 jours revient aux propriétaires d’entreprise, aux fermiers et aux travailleurs.
Le lundi 13 avril 2020, le Gouvernement fédéral a annoncé un fond de $50 millions de dollars afin d’aider les secteurs de l’agriculture et de la transformation alimentaire à mettre en place et à compenser les règles d’auto-isolation obligatoire de 14 jours pour les travailleurs migrants nouvellement arrivés. Cependant, les détails de l’application de ceci dans les provinces respectives n’étaient pas immédiatement clairs. Certains défenseurs se sont opposés à ce programme de financement pour les employeurs car, selon eux, beaucoup des coûts traditionnels liés à l’emploi sont souvent injustement transférés aux travailleurs migrants mêmes. Une partie des $50 millions de fonds annoncés ira à l’Agence canadienne d’inspection des aliments afin d’augmenter le nombre d’inspecteurs qui s’assurent que les protocoles de sécurité sont respectés afin que les usines de transformation et les activités agricoles puissent continuer à tourner.
Ces dernières semaines, la fermeture de l’usine de transformation de viande Cargill, dont le personnel est majoritairement des travailleurs étrangers, et une épidémie de la COVID-19 dans une serre de l’Ontario ayant impacté plus de 40 travailleurs migrants, ont montré les sérieux problèmes de santé et de sécurité encourus par une population très marginalisée de travailleurs et a remis ces lignes directrices en question.
Les logements mis en place pour les travailleurs agricoles migrants ont également été critiqués par le passé parce qu’ils étaient surpeuplés et insuffisamment équipés pour loger les travailleurs. Par temps de COVID-19, le respect des mesures d’éloignement physique et d’une bonne hygiène se révélera difficile dans ce type de logement partagé. Les hôtels ont été recommandés comme une alternative afin de s’assurer que les travailleurs migrants puissent observer solitairement l’auto-isolation obligatoire de 14 jours avant d’avoir accès aux logements partagés sur leur lieu de travail. Le Québec a même déclaré que des responsables de la santé publique seraient en charge du suivi des employeurs afin de s’assurer du respect de la période obligatoire de quarantaine.
Nous savons qu’en temps normal (sans pandémie), les travailleurs étrangers sont peu disposés à déclarer des blessures liées à leur emploi, des conditions d’exploitation au travail ou des maladies, par peur de perdre leur salaire ainsi que la possibilité de revenir au Canada l’année suivante. Cette réalité ne change pas dans les circonstances actuelles. Les travailleurs étrangers sont même plutôt à un risque élevé de contracter et de répandre la COVID-19 puisqu’ils ne peuvent pas respecter les mesures d’ éloignement physique lorsqu’ils vivent dans des logements partagés, et certains pourraient choisir de rester silencieux.
Plus tôt ce mois-ci, des provinces de partout au pays ont réagi à certaines de ces inquiétudes. Par exemple, la province de la Colombie-Britannique a supprimé la période d’attente pour la couverture médicale provinciale pour les travailleurs étrangers qui pourraient avoir des requêtes liées à la COVID-19. Le gouvernement de l’Ontario a également supprimé la période d’attente de 3 mois pour la couverture RAMO et couvrira le coût des soins relatifs à la COVID-19 pour ceux qui sont sans assurance ou qui ne satisfont pas aux critères de RAMO. Les représentants de la province du Québec ont également annoncé que le coût des soins de santé sera couvert pour ceux qui ne satisfont généralement pas aux critères de la couverture des soins de santé. Enfin, des défenseurs du Health Care for All en Alberta ont exhorté le gouvernement provincial à étendre la couverture à ceux sans statut, y compris les travailleurs étrangers temporaires, car ils sont inquiets que ceux qui tombent malade à cause de la COVID-19 dans la province ne se fassent pas traiter à cause de barrières financières.
Bien que le Canada dépende de la contribution significative apportée par les fermiers et les travailleurs étrangers pour la production et la transformation de la nourriture année après année, 2020 et sa pandémie amènent avec eux non seulement des défis, mais également des opportunités. Il est difficile de se souvenir d’un temps où autant d’attention était portée au soutient de la chaîne d’approvisionnement domestique et aux appels des voisins afin d’acheter local pour stimuler notre économie. Alors que nous nous rassemblons devant nos portes et à nos balcons pour acclamer les efforts des travailleurs essentiels, pourquoi ne pas également élever nos voix en soutien des droits et de la protection des travailleurs étrangers essentiels du Canada ?
Ressources pour les travailleurs migrants :
Le Migrant Worker Hub a rassemblé une liste de ressources liées à la COVID-19 (en anglais) et des mises à jour pour les travailleurs migrants.
Le Gouvernement du Canada a publié un document (en anglais) avec des lignes directrices pour les employeurs de travailleurs étrangers temporaires pendant la COVID-19.
Polaris a écrit un article sur l’impact de la COVID-19 sur les travailleurs domestiques (en anglais), dont beaucoup sont maintenant à un risque élevé d’exploitation.
Le Gouvernement du Canada a des informations supplémentaires, non-liées au COVID-19, sur les droits des travailleurs étrangers temporaires au Canada
Service Canada a un outils de signalement de la fraude pour travailleurs afin de signaler des environnements de travail dangereux ou de mauvais traitements.
Les travailleurs migrants maltraités peuvent maintenant faire la demande d’un permis de travail ouvert.
Les travailleurs migrants dans une situation d’exploitation ou de traite des personnes sont invités à appeler la Ligne d’urgence canadienne contre la traite des personnes confidentielle et disponible 24h/24, 7j/7 au 1 833 900-1010 afin d’accéder à du soutien et des services.