La réforme de l’immigration n’est pas seulement une question de chiffres. Il s’agit aussi de protéger les gens.

La politique restrictive du gouvernement fédéral concernant les heures de travail risque de rendre les étudiant.e.s internationaux vulnérables à l’exploitation, à la traite des personnes et aux abus.

La population d’étudiant.e.s internationaux au Canada a considérablement augmenté au cours des deux dernières décennies. À la fin de 2023, il y avait plus de un million d’étudiant.e.s internationaux au Canada – une hausse impressionnante par rapport aux 301 545 étudiant.e.s de 2013.[1] Bien que ces étudiant.e.s contribuent de manière significative à l’économie canadienne, ils font face à des défis croissants qui les rendent vulnérables à l’exploitation, aux abus et à la traite des personnes.

Les étudiant.e.s internationaux paient des frais de scolarité plus élevés que les étudiant.e.s nationaux, fournissant une source de revenus cruciale pour les collèges et universités canadiens. Cet afflux de fonds a un impact substantiel sur l’économie, dépassant même les exportations traditionnelles telles que les pièces automobiles, le bois et les avions.[2] De plus, les employeur.euses canadien.ne.s bénéficient des compétences et des talents des étudiant.e.s internationaux, qui rejoignent souvent la main-d’œuvre et aident à répondre aux besoins du marché du travail.

Malgré ces contributions, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a récemment annoncé que la politique temporaire permettant aux étudiant.e.s de travailler plus de 20 heures par semaine hors campus prendra fin le 30 avril 2024. Cet automne, Ottawa prévoit de modifier le nombre d’heures que les étudiant.e.s étrangers peuvent travailler hors campus par semaine à 24 heures pendant les sessions académiques.

Le Centre canadien pour mettre fin à la traite des personnes estime que les récentes annonces rendront les étudiant.e.s vulnérables à l’exploitation. Contrairement aux idées reçues, de nombreux étudiant.e.s internationaux ne viennent pas de familles aisées. Leur capacité à vivre au Canada, notamment en période de crise du coût de la vie, dépend souvent de l’accès à des revenus d’emploi. Restreindre la capacité des étudiant.e.s à travailler plus de 24 heures par semaine est susceptible de les pousser dans l’économie grise, la partie de toute économie qui n’est ni imposée ni surveillée par aucune forme de gouvernement, pour payer leurs factures. Cela les rend vulnérables à des employeur.euses sans scrupules qui peuvent les exploiter et les faire entrer dans la traite des personnes en les menaçant, en les exposant à des conditions de travail dangereuses et en réduisant et retenant leur salaire. L’inéligibilité des étudiant.e.s internationaux à certains services sociaux marginalise encore davantage cette population des soutiens et des informations dont elle a besoin.

Le Centre recommande les solutions suivantes pour répondre aux vulnérabilités auxquelles les étudiant.e.s internationaux sont confrontés :

Lever les restrictions sur les heures de travail : Supprimer de manière permanente les restrictions de travail pour aider les étudiant.e.s à subvenir à leurs besoins et réduire leur vulnérabilité.

Normaliser la supervision des recruteurs éducatifs : Adopter la Déclaration de Londres pour promouvoir des pratiques de recrutement éthiques et garantir des normes provinciales pour informer les étudiant.e.s de leurs droits et de leur accès aux services sociaux.

Renforcer la Stratégie canadienne en matière d’éducation internationale : Évaluer l’efficacité du programme de permis d’études et impliquer les parties prenantes dans l’identification des défis. De plus, il est nécessaire que les institutions construisent des logements adaptés pour les étudiants internationaux.

Élargir les services d’établissement : Rendre les services d’accueil financés par le fédéral accessibles aux étudiant.e.s internationaux pour soutenir leur intégration.

Combattre la désinformation : Collaborer avec les pays d’origine et les organisations internationales pour surveiller et aborder les informations trompeuses qui affectent les étudiant.e.s internationaux.

Ces changements de politique soulignent la nécessité de réformes globales pour répondre aux vulnérabilités auxquelles les étudiant.e.s internationaux sont confrontés. Le Canada doit prioriser des protections et un soutien renforcés pour les étudiant.e.s internationaux, garantissant qu’ils puissent poursuivre leurs études sans crainte d’exploitation et d’abus. Ce faisant, le Canada peut maintenir sa réputation de destination accueillante pour les étudiants du monde entier tout en protégeant leurs droits et leur bien-être.

L’exploitation se produit au Canada et cela peut arriver à n’importe qui. Si vous soupçonnez que vous ou quelqu’un que vous connaissez pourriez être exploité, veuillez appeler le 911 en cas d’urgence. Si ce n’est pas une urgence, veuillez appeler le 1-833-900-1010 ou contacter via le chat à www.canadianhumantraffickinghotline.ca. La Ligne d’urgence canadienne contre la traite des personnes est un service confidentiel et multilingue disponible 24h/24 et 7j/7. La ligne d’urgence utilise une approche centrée sur les victimes pour connecter les victimes et survivant.e.s de la traite des personnes avec des soutiens et services locaux d’urgence, de transition et/ou de long terme à travers le pays, ainsi que pour connecter les appelants aux forces de l’ordre lorsque cela est approprié.


[1] Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. (2023). Résidents temporaires: Détenteurs de Permis d’étude. Consulté le 23 mai 2024. 

[2] Les étudiant.e.s internationaux sont responsables de près de 40 % de tous les frais de scolarité au Canada. Hune-Brown, N. (18 août 2021). The Shadowy Business of International Education, The Walrus. Cependant, ils ne représentent que 17 % de la population étudiante postsecondaire. Statistique Canada. (2022). Table 37-10-0086-01 Postsecondary enrolments, by status of student in Canada, country of citizenship and gender. Consulté le 19 juin 2023.